L’essentiel et les points à retenir :
- La perception des métiers exercés par les femmes peut affecter la reconnaissance de leurs qualifications.
- Les différences de reconnaissance des qualifications peuvent expliquer les écarts salariaux persistants entre hommes et femmes.
- Les conditions de travail varient souvent selon le sexe, avec des hommes plus exposés à la pénibilité physique et des femmes à une pression temporelle et une charge mentale importante.
Selon cette représentation, si les métiers qu’exercent la majorité des femmes ne sont perçus que comme la reproduction de ce qu’elles font dans la sphère personnelle, si on considère implicitement qu’elles n’ont pas besoin de compétences particulières pour exercer ces métiers, cela peut avoir un impact sur la reconnaissance de leurs qualifications. Cette moindre reconnaissance de leurs qualifications peut engendrer une plus faible valorisation des emplois qu’elles occupent et expliquer, in fine, que persistent des différences salariales, héritées des classifications professionnelles qui ont été construites antérieurement.
Des conditions de travail souvent différentes entre les femmes et les hommes en raison de leurs métiers
Les salariés n’ont pas les mêmes conditions de travail selon leur sexe [Ouvrir dans un nouvel ongletAvril, Marichalar, 2016]. Les hommes sont plus exposés à la pénibilité physique, comme porter des charges lourdes ou travailler dans un environnement agressif, alors que les femmes subissent plus souvent une pression temporelle, les obligeant à se dépêcher ou à exécuter des gestes répétitifs. Elles disposent de moins d’autonomie dans l’organisation de leur travail et sont plus exposées à une charge mentale importante (penser à trop de choses à la fois, cacher leurs émotions, etc.).
Les femmes peuvent-elles faire tous les métiers?
Les femmes peuvent faire des métiers d’hommes.Les femmes ont les compétences pour faire des métiers masculins mais elles en sont dissuadées par l’effet matilda, la menace du stéréotype et le syndrome de l’imposteur. Oui, les femmes sont capables de faire tous les métiers ! On vous explique pourquoi certaines personnes pensent encore que les filles ne peuvent pas faire tous les métiers et pourquoi ces personnes se trompent.
Nadia*, 24 ans, pompier : “Quand on assiste une femme victime d’agression sexuelle, c’est toujours plus simple pour communiquer s’il y a une femme pompier sur l’intervention”
« Au début, intégrer une caserne me faisait peur. C’est réputé pour être très sportif, je suis une ancienne ronde et j’ai perdu beaucoup de poids, donc c’était un défi à relever pour moi. Mais l’intégration avec les hommes s’est plutôt bien passée, j’ai pas mal de repartie quand il faut avoir du répondant. J’avais peur de devoir ravaler ma fierté, surtout qu’en tant que femme, on est minoritaire et on peut facilement se faire marcher sur les pieds ! Dans ma première caserne, j’étais la seule pompier au grade de première classe, sur le terrain. Il y avait une autre femme, mais qui avait le grade de sergent. Comme on n’était pas sur le même palier parce qu’il y a un système de grades à respecter, nous n’étions pas proches, il n’y avait pas de “solidarité féminine” entre nous. Je me sentais un peu la seule fille sur le bateau. Mes collègues masculins appréhendaient de partir en intervention avec moi parce que je suis une femme. Ça m’est déjà arrivé que, pour un brancardage, le chef d’agrès me propose de me remplacer, alors que c’est mon rôle. Ou bien des petites remarques du type : “Ça va aller pour porter, au niveau du poids ?” Durant les interventions difficiles, mes collègues avaient tendance à s’inquiéter davantage. J’ai eu quelque chose à prouver, peut-être plus qu’un homme. Mais je ne pense pas que ce soit volontaire de leur part, c’est inconscient. Il y a tellement peu de femmes qu’ils n’ont pas l’habitude. Et puis les mecs de la caserne sont un peu patauds avec l’idée qu’une femme, c’est difficile, c’est fragile… Ils se rassurent en me posant des questions, pour savoir si tout va bien ou par souci de galanterie. Comme je suis une fille, il faut être “plus sympa”. Moi, je suis le genre de personne qui prend mal ces comportements : je n’aime pas le favoritisme et je n’aime pas être fragilisée. Certains se complaisent là-dedans, pas moi. Ce que j’envie quand même aux garçons – et en ce sens, je pense qu’il y a un avantage à être un homme chez les pompiers –, c’est la complicité. Étant donné que je suis une fille, je vais être extérieure à certaines choses et à certaines conversations. Sinon, peut-être aussi au niveau de la musculature, mais je suis persuadée qu’on a besoin des forces de chacun. Un exemple : en secours routier, seules les personnes fines et de petite taille arriveront à se faufiler à l’intérieur du véhicule pour porter assistance à quelqu’un qui serait coincé. On a besoin de tous les physiques, de tous les corps. Aussi, quand on assiste une femme victime d’agression sexuelle, ou une femme enceinte par exemple, c’est toujours plus simple pour communiquer s’il y a une femme pompier pour intervenir avec les garçons. Une présence féminine peut énormément aider sur ce type d’intervention. Je trouve cela intéressant, car ça ne me rabaisse pas en tant que femme, mais ça me rend, au contraire, complémentaire. En revanche, ce qui m’arrive souvent en intervention, ce sont des remarques du type : “Oh, c’est rare de voir une fille chez les pompiers !” Au début, c’était marrant, mais au bout d’un moment ça devient lourd. »
Ça n’évolue donc pas. La mixité des métiers n’est pas pour demain. Les femmes se concentrent dans les mêmes secteurs. 50% des femmes se retrouvent dans seulement douze familles professionnelles alors qu’il en existe 87. 70% des étudiants en filières lettres sont des jeunes femmes. 85% pour les sciences humaines. 85% pour les filières paramédicales et sociales. On est loin de l’objectif de 30% de métiers mixtes à l’horizon 2025. Un métier mixte, selon l’Insee, c’est un métier dans lequel on trouve entre 40 et 60% des deux sexes.
tableauFigure 1 – La présence des femmes progresse, y compris dans les métiers à dominance masculineIndicateurs sur la répartition et l’évolution de l’emploi dans le Grand Est La présence des femmes progresse, y compris dans les métiers à dominance masculine – Lecture : en 2014 dans le Grand Est, 23 métiers sont à dominance féminine, soit un de plus qu’en 1990. Ils regroupent 923 000 personnes en emploi, dont 731 000 femmes (soit 79,2 %). Entre 1990 et 2014, ces effectifs ont augmenté de 0,9 % en moyenne par an, plus fortement pour les femmes (+ 1,0 %) que pour les hommes (+ 0,4 %). Le taux de féminisation a ainsi progressé de 2,5 points. Métiers à dominance féminineMétiers à dominance masculineMétiers à dominance mixteEnsemble des métiers Situation en 2014 Nombre de métiers 23 44 19 86 Effectifs féminins 731 000 126 000 167 000 1 024 000 Effectifs masculins 192 000 739 000 213 000 1 144 000 Effectifs totaux 923 000 865 000 381 000 2 168 000 Taux de féminisation (en %) 79,2 14,6 43,9 47,2 Évolution entre 1990 et 2014 Nombre de métiers 1 1 -2 0 Taux d’évolution annuel moyen (en %) Effectifs féminins 1,0 0,5 1,3 1,0 Effectifs masculins 0,4 -0,5 0,5 -0,2 Effectifs totaux 0,9 -0,4 0,8 0,3 Évolution du taux de féminisation (en points de %) 2,5 2,8 5,0 7,2
- Lecture : en 2014 dans le Grand Est, 23 métiers sont à dominance féminine, soit un de plus qu’en 1990. Ils regroupent 923 000 personnes en emploi, dont 731 000 femmes (soit 79,2 %). Entre 1990 et 2014, ces effectifs ont augmenté de 0,9 % en moyenne par an, plus fortement pour les femmes (+ 1,0 %) que pour les hommes (+ 0,4 %). Le taux de féminisation a ainsi progressé de 2,5 points.
- Champ : personnes en emploi de 15 à 59 ans résidant dans le Grand Est.
- Source : Insee, recensements de la population de 1990 et 2014.
Les métiers de l’informatique et des télécommunications se sont fortement masculinisés
Les trois métiers de l’informatique et des télécommunications sont ceux qui se démarquent le plus par une baisse de la féminisation. Porté par l’essor des nouvelles technologies, ce domaine est dynamique. Le nombre d’emplois y augmente plus rapidement que dans l’ensemble de l’économie régionale (+ 2 % en moyenne par an pour + 0,3 % entre 1990 et 2014) (figure 2). Malgré ce dynamisme, la dominance masculine de ces métiers s’est renforcée. La part de femmes y a diminué d’un tiers, passant de 36 % à 17 %. Au niveau national, la baisse de la féminisation est moins forte dans ces métiers (- 13 points contre – 19 dans la région). L’emploi des hommes y augmente plus rapidement que celui des femmes alors que dans la région les femmes y sont moins nombreuses.
En outre, dans les métiers mixtes, dans les métiers féminisés de service et les métiers masculinisés ouvriers, où les risques professionnels sont les plus élevés, les femmes sont davantage confrontées que les hommes à tous les risques (travail intense, conflits de valeur, instabilité du poste, manque d’autonomie et de reconnaissance, etc.) à l’exception de la pénibilité physique. Ces différences d’expositions amènent à s’interroger sur le rôle des normes de genre dans les risques que les femmes et les hommes encourent dans leur travail, y compris dans leur appréhension.
1. Examiner les ressorts de la demande en emplois numériques, puis doter les jeunes femmes des compétences nécessaires pour exercer ces emplois
Dans un premier temps, les programmes doivent identifier les secteurs demandeurs d’emplois numériques. Un précédent rapport publié par S4YE (Digital Jobs for Youth: Young Women in the Digital Economy) met en évidence les quatre principales sources de création d’emplois dans le numérique : a) le secteur public ; b) le secteur privé ; (c) l’externalisation en ligne et d) les plateformes numériques pour les services à la demande (de type Uber) ou le commerce électronique (Etsy, Alibaba…). Identifier les facteurs locaux est une étape essentielle pour mieux cibler les programmes pour l’emploi. Un dispositif qui entend soutenir la création d’emplois pour des femmes résidant en milieu rural et moyennement aguerries aux technologies digitales pourra, par exemple, privilégier les possibilités offertes par les plateformes de microtravail. Un programme destiné aux jeunes femmes diplômées du supérieur pourra en revanche miser davantage sur l’entrepreneuriat numérique.